Sa critique : Quel dommage que ce film d’animation à l’ancienne, dont on doit le scénario et la supervision de l’univers graphique au grand Jacques Tardi, se soit lamentablement planté au box-office, récoltant la pacotille de 120000 entrées sur tout le territoire français...car “Avril et le monde truqué” est bel et bien l’un des tout meilleurs films d’animation de 2015, un émerveillement Steampunk et uchronique qui retrouve, dans sa manière d’agencer les rebondissements de son scénario, le charme suranné des grands classiques de la bande dessinée franco-belge tels que Tintin ou Blake et Mortimer. La logique uchronique du scénario démarre sur des bases passionnantes : suite à la mort prématurée de Napoléon III, la guerre franco-prussienne n’a pas eu lieu, faisant prendre un tour totalement différent à l’histoire du monde. Près de septante ans plus tard, l’Empire français est la puissance dominante de la planète...mais les avancées technologiques ont connu un brutal coup d’arrêt, suite à la disparition mystérieuse de tous les potentiels scientifiques d’exception, et la science en est restée à l’usage de la vapeur et du charbon. Avril, fille de deux scientifiques également disparus, vivote à Paris avec son curieux chat parlant, détentrice sans le savoir d’un sérum d’invulnérabilité concocté jadis par son arrière grand-père. Un tel postulat de départ laisse évidemment libre cours à un véritable foisonnement visuel, à l’image de ce Paris noir de suie où des tours Eiffel jumelles permettent à des téléphériques de circuler entre le capitale française et Berlin...où ces voitures-vapeurs utilisées par la police secrète pour traquer les savants qui refusent de mettre leurs connaissances au service de la politique impériale. Traditionnel point faible des productions européennes, le rythme et la fluidité scénaristiques s’avèrent ici au-dessus de tout reproche, tout en évitant - et c’est heureux ! - l’agitation stérile qui plombe tant de productions américaines. Evidemment, tout n’est pas complètement réussi : ni l’histoire d’amour naissante ni les relations familiales ou amicales entre les personnages ne se montrent très élaborées. Mais on aura tant attendu une adaptation de BD franco-belge qui tienne la route, propose un scénario digne de ce nom et un univers véritablement original, qu’on ne risque pas de se laisser déstabiliser par d’aussi menues faiblesses, au demeurant pas vraiment mieux gérés dans la plupart des autres productions d’animation.
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